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L'autre Tracevide
#1
[Zen]
Sémirande avait parfaitement suivi les échanges de tirs entre les deux Tracevide et leur Lilith. Elle avait ressenti dans son corps cybernétique l'ébranlement causé par l'impact sur la coque. Cela n'avait pas le moins du monde affecté sa concentration. Non pas qu'elle ignorât la peur. "Seuls les idiots n'ont pas peur !" aimait-elle à répéter. Mais assister à un combat, impuissante, enfermée dans un habitacle, un hangar, si ce n'était tout simplement sa cabine, cette situation lui était familière.
On s'habituait
Mais cela ne laissait jamais indifférent.
Une règle d'or dans ce cas était de s'occuper le corps et l'esprit ; et pour l'heure elle était servie.
Sémirande était une Navyborg expérimentée, mais jamais elle n'avait ressenti le pilotage à la façon d'un Gurvan, pour lequel le vaisseau était une extension de son corps. Lui tendait un bras pour pointer un scanner, marchait ou courait pour faire s'avancer son engin, s'agenouillait pour le mettre en vol stationnaire. Sémirande, elle, devenait la machine, son corps disparaissait quand elle pilotait. Elle était le vaisseau.
C'était deux façons de concevoir cette discipline, et l'une valait bien l'autre.
Pour le Méka, le problème se posait différemment, à cause de l'anthropomorphisme de la machine. Sémirande se concentra un moment, repassant calmement les milliers de lignes du mode opératoire pour s'en imprégner une fois encore. Cependant, elle termina cette opération en murmurant "N'oublie pas que ce sont tes jambes tes bras, tes mains."
Cela fait elle éteignit tous les affichages, jusqu'à la plus petite lumière, et activa son engin. Il lui sembla grandir d'un coup, et bien que le hangar fut plongé dans l'obscurité, elle le vit distinctement se réduire aux dimensions d'une boite tout juste suffisante pour contenir ce second corps mécanique...
Bien. Elle dépressurisa le hangar, non pas en vidant l'air vers l'extérieur (ce qui aurait provoqué un nuage de vapeur trop reconnaissable) mais en le faisant réintégrer les réservoirs de Lilith. Et l'air contenu dans l'habitacle suivit le même chemin. Cela prit trente secondes.
Ouverture des portes.
Il n'y eut pas de vantaux pivotant avec majesté. C'était plus moderne que cela. Cette partie de la coque était énergisée de façon très particulière. Elle disparut simplement, tandis que la lumière du soleil entrait à flot dans cette encoche où le Formec, maintenant bien visible, commençait à plier ses jambes.
Oui, parce que Sémirande ne voulait pas utiliser encore ses moteurs ioniques. D'abord le flux de particules brûlantes aurait pu salir voir endommager le fond du hangar. Ensuite, c'était tellement plus jouissif de...
Les jambes se détendirent, et l'engin se propulsa dans le vide, en direction d'un astéroïde tout proche. Pas question de l'atteindre ainsi, certes, mais durant les quelques secondes qu'elle mit à atteindre la distance de sécurité qu'elle s'était fixée, la jeune femme se prit pour... non, rien, oubliez.
Elle alluma les ioniques, dont la puissance était sans commune mesure avec les systèmes produits par les engins des débuts des ère spatiales. Elle ne donna qu'une impulsion, et sonda la surface grise qui s'approchait à bonne vitesse. De la roche (chondrites carbonées) et de la glace. Hum, de quoi fabriquer une jolie villa loin de tout ! se dit-elle alors qu'elle atterrissait mi freinant aux ioniques, mi pliant les jambes. La gravité était quasi nulle, évidemment, et c'est en rampant à moitié qu'elle se déplaça vers l'autre face située à cinq cent mètres.
Nouvel appui, nouvel élan et nouveau saut, plus long celui-ci.
Elle était très vulnérable maintenant. L'équipage du Tracevide bord à bord avec la Lilith devait être bien occupé. Mais celui que Gurvan avait envoyé dinguer à 150 km pouvait avoir récupéré plus vite.
Pourtant... il y avait quelque chose d'immensément poétique à sauter ainsi de roche en roche, perdue dans le vide, voyant l'astéroïde qu'elle venait de quitter se transformer en un point lumineux tandis que l'aiguille de lumière qu'elle visait se rapprochait à son tour. Elle en oublia un moment le danger qui la menaçait et contre lequel elle ne pouvait rien : un coup de laser sur son Méka quasi-impuissant dans cette posture. A un moment, elle prit même deux ou trois précieuses secondes pour s'émerveiller des feux de Saint-Elme que les vents solaires faisaient naître sur sa carapace. Un moment surréaliste, entre joie enfantine et menace de mort.
Elle s'approcha cependant sans incident de son objectif. Il était collé à un bloc de glace d'eau que les impuretés qu'elle contenait transformait en une sorte de pierre précieuse mandarine. Sémi regretta que l'astre solaire n'eût pas plutôt été blanc ou jaune, cela aurait donné un vert émeraude superbe.
Le Tracevide devait avoir "morflé", mais pas tant que cela ; la preuve étant qu'il utilisait la masse gelée comme écran aux tirs éventuels de la Lilith. Il était donc encore manœuvrant et elle allait devoir être prudente.
Utilisant elle aussi le gros glaçon comme écran, elle s'approcha, priant les dieux qu'ils ne la vissent pas par transparence. Sans utiliser les ioniques, elle atterrit sur la surface qui s'effrita, s'y enfonçant jusqu'aux genoux. Elle se dégagea cependant assez vite, et rampa de nouveau vers son objectif. Il y avait trois kilomètres à faire là, qu'elle parcourut du plus vite qu'elle put, ses mains prenant des prises dont une sur deux se désagrégeait. Se retournant, elle vit qu'un joli sillage de paillettes gelées s'élevaient au-dessus du chemin qu'elle s'était frayée. "Mèèèèr...credi !" Mais avec les ioniques cela aurait été pire.
Encore une crête de glace et... non, il y en avait une autre derrière. Là, maintenant... eh bien non.
Les petites crevasses se succédaient encore et encore et l'horizon si proche ne permettait pas d'appréhender correctement la distance restant à parcourir. Quand passer un coup de sonde actif, autant allumer la radio et dire "Coucou j'arrive !"
Et brutalement, elle tomba nez à nez dessus. Il avait sorti des amarres matérielles pour s'accrocher au bloc, sans doute pour la même raison qui avait dissuadé Sémi d'utiliser ses détecteurs actifs : la discrétion.
Elle décida de prendre une seconde ou deux pour mesurer la situation. Et évidemment ce fut à ce moment là qu'il commença à rétracter ses ancres.
Sémirande poussa un cri sauvage en sautant d'une détente vigoureuse, et tous moteurs crachant, sur sa cible.
Comme sur tous ces petits vaisseaux, ce devait être un pilotage arrière. Elle atterrit sur la coque, s'ancra et tira à l'endroit approximatif où devaient se situer une partie de l'avionique. Son canon laser était à bout touchant.
Elle espérait que les systèmes n'étaient pas trop redondants, parce que là...


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