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Estébois
//J'enchaine histoire que l'on ne fasse pas trop attendre notre ami Manchu. Je prends pour acquis que Khrys a donné son accord à l'enquéteur spécial et que le faux sergent a été remis lourdement sédaté.

Le jour noyé de brume se levait sur le petit astroport, l’aube aux doigts de rose griffait la carnation de la nuit.

La petite troupe sortie du Méphisto, abandonnant à regret sa coque protectrice, son havre de sécurité, leur foyer d’adoption au sein de l’immensité de l’espace. L’image du babarermyte*, s’imposa à eux.

Khrys pilotait le sarcophage, Khaadaric l’œil vif cherchait à repérer tout mouvement suspect, Djal tenait contre lui son sac contenant sa précieuse console, monsieur Baser en long manteau de cuir, fumait une cigarette ajoutant au smog ambiant.
La lueur du soleil levant projetait de longues ombres diffuses, faisant naitre ça et là des recoins d’obscurité inquiétante.

Un technicien local, la démarche chaloupée, en bleu de travail, s’approcha d’eux. Sous sa casquette Khrys reconnu à peine l’enquêteur spécial Lorimo. Celui-ci était grimé : une fausse barbe assez réussie, et il avait l’air d’avoir rapetissé d’une bonne dizaine de centimètres. Hé bé, zavez des codes à m’fournir ? Vous z’inquiétez pas … On va être aux pt’its soins. Il s’approcha du médibloc sous lequel l’air miroitait dans le champ antigrav. Il tapota sur la verrière opalescente dans laquelle on devinait un corps allongé. M’entendez commandant ? Tout va bien s’passer : faites nous confiance. Il leur désigna la grande porte menant à la ville lacustre. J’vous chasse pas hein ? Mais il faudrait y’aller.

Ils retrouvèrent passé celles-ci le grand pont et l’atmosphère humide et froide, chargée de fumées domestique de la cité. Quelques pécheurs arrivaient sur le pont, d’autres qui avaient péché pendant la nuit à la lanterne étaient en train de remballer.

Il n’y avait pas encore grand monde sur les ponts, pontons, quais, mais petit à petit la cité reprenait vie. Elle s’étirait, baillait. Heureusement pour eux les habitants ne prêtaient pas encore attention à leur étrange équipage.

Khaadaric continuait à veiller. Le moins que l’on puisse dire c’est que leur service de protection était discret. Ce pécheur qui ravaudait son filet tout en mâchonnant sa chique ? Cette femme qui battait son matelas sur son balcon de bois sculpté ? Ce soldat, uniforme entrouvert, barbe naissante qui embrassait à pleine bouche une fille de joie qu’il tenait serrée dans l’embrasure d’une porte ? Le marchand ambulant qui proposait ses petits pains chauds fourrés à la viande épicée qu’il tenait au chaud sur son petit chariot à bras ? Ca pouvait être n’importe qui. Il claqua de la langue, frustré.

Leurs pas les amenèrent au Poulenet Fougeux. Après une courte négociation Khrys obtint du concierge qui était aussi l’aubergiste une « suite » qui s’avérera être une grande chambre collective dotée malgré tout d’installations sanitaires dignes de ce nom. Khaadaric commença par fermer les rideaux. On ne le lui ferait pas deux fois le même coup. Pendant ce temps Monsieur Baser entreprit de remonter son fusil laser.

Pendant ce temps …

Gurvan s’était glissé dans le vieux formec. C’était un ancien modèle, une antiquité qui pouvait se piloter au plot, mais aussi à l’aide de commandes manuelles. Il alluma les circuits uns à uns, faisant un check par acquis de conscience. Tous les voyants étaient au vert. Il faudrait changer le liquide de refroidissement dans 800 heures, remplacer un circuit secondaire d’alarme incendie avant 22 heures de fonctionnement. Le gyrophare holographique orangé jeta son éclat alterné sur les murs de la soute.

Il obscurcit la verrière puis fit avancer le formec dont les lourds pas ébranlèrent le pont. Il saisit entre les pinces le conteneur en matière recyclé renfermant les déchés finaux non réutilisables du bord. La rampe se déplia lui permettant de descendre avec son lourd chargement. Les quelques techniciens présents s’écartèrent de son chemin : la caisse marquée du sigle des déchés non recyclables lui servait de passeport.

Il attendit devant la porte surveillant d’un œil les échanges automatisés entre le formec et les systèmes automatisés de l’astroport. Les capteurs scannèrent le conteneur, s’assurant qu’il n’y avait pas de marchandises de contrebande à l’intérieur. La porte s’ouvrit sur la rampe graisseuse. Il s’assura sur les caméras de recul que personne ne lui prêtait attention. C’était le moment. Il ouvrit la verrière et se faufila dehors ordonnant la fermeture de la verrière alors que celle-ci n’était pas encore complètement ouverte. Il se colla au conteneur et commanda l’ouverture des pinces du formec.

Il avait allumé son champ de force individuel, il glissa sur la rampe graisseuse à la suite du conteneur atterrissant dans une gerbe d’éclaboussures dans la cale de la gabare à ordure. Vite ! Il jeta un coup d’œil la brume était un avantage, personne n’avait visiblement vu sa grande évasion. Il bascula à l’eau, laissant se refermer sur lui les eaux maronnasses du fleuve.

L’obscurité grandit. Un mètre, deux mètres, trois mètres, quatre mètres. Il faisait totalement noir maintenant. L’alarme de sa combinaison retentie : la pression exercée sur la combinaison dépassait les cinq kilos par cm carré engendrant une diminution de l’autonomie énergétique. Rien de grave, mais il ne s’agissait pas de descendre trop profondément. Les antigravs le stabilisèrent : dans ce cas précis il s’agissait surtout de l’empêcher de remonter. Il appela d’une pensée le plan des installations de surface. Il avait repéré son point d’émersion : trois canaux plus loin, un dock presque abandonné dont un quai bas lui permettrait de remonter facilement. Il lança la ceinture de vol. Celle-ci se recalibra automatiquement à la densité de l’eau … Il ne fallait pas s’attendre à des pointes de vitesse de folie, d’ailleurs ce n’aurait pas été prudent : la trainée générée risquait de le faire repérer. Plongé dans le noir, pilotant aux instruments il zizaga à proximité du fond vaseux, priant pour ne pas rentrer en collision avec une épave, un tronc d’arbre.

Tout se passa bien.

Quelques minutes plus tard il s’extrayait des eaux noires, laissant ruisseler sur son champ de force miroitant les algues et la vase. Il fit quelques pas avant de le couper. Quelques minutes plus tard il entrait dans l’échoppe d’un tailleur qui était en train de retirer les volets de bois à cette heure matinale. On lui demanda de repasser, mais quelques pièces de fer qu’il fit sonner dans sa main ramenèrent à de meilleurs sentiments l’irascible commerçant. Il en reparti une grosse demi heure plus tard, portant un gros ballot contenant de quoi habiller de pied en cape à la mode locale les membres de son équipe. Il avait été copieusement arnaqué par le tailleur, mais la vitesse était primordiale.

Il lui fallut encore quarante minutes pour parvenir à s’introduire au poulenet fougueux, utilisant pour l’occasion l’entrée des cuisines. Il grimpa l’escalier et rejoignit ses amis qui l’attendaient bien sagement dans une suite.

… Et maintenant ?

*babarermyte : créature au corps mou multicellulaire mesurant jusqu’à 6 mètres, vivant dans les dépôts d’épaves spatiales de Cracrash IV et utilisant des morceaux des fragments de navires pour se protéger des pluies de micrométéorites.
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