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Full Version: Horizon de nuages
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[Bilan]

Gurvan avait quant à lui choisi les filets de volailles accompagnés d'un gratin d'oignons-chivre, avec lesquels il buvait une infusion de feuilles de chivre blanc. Lorsque l'hatani avait suggéré au reste du groupe de faire la visite technique de la cité-dirigeable, il avait souri en gardant les lèvres pincées et lui avait répondu sur un ton amusé :

"Merci de ton conseil, Virik. Certains d'entre nous l'ont déjà faite avec le capitaine Ocano, pendant que tu... t'adaptais aux conditions locales en restant dans ta cabine."

Vraïm Ocano dégustait ses boulettes de porçon en écoutant attentivement les échanges de ses hôtes -- du moins ceux fait à voix suffisamment haute pour être entendus par tous les convives. Il répondit à l'infonaute :

"Nous élevons des porçons et des colverts dans le secteur agro de Temuera, en même temps que nous cultivons céréales à haut rendement et légumes secs dans des bac hydroponiques. Nos ancêtres ont utilisé des machines à alimenter et des robochefs pendant plusieurs siècles, mais elles ont fini par tomber en panne, en raison de la raréfaction des matières premières et du manque d'entretien."

Il hocha la tête.

"Daïnil vous fera faire la visite à laquelle Ser Kiikti a eu droit, Maître Gorda. N'hésitez pas à lui demander de vous montrer la moindre de nos installations."

Il mâcha pensivement une boulette, fit une pause avant de répondre à la dernière question de Djal :

"Nous, Pourvoyeurs, nous sommes les gardiens de la technologie antique entreposée dans les vaisseaux d'ensemencement, nous procurons du métal aux autres cités, et nous récupérons de grandes quantités de toile pour consolider le réseau de ballons captifs qui soutiennent les épaves, ainsi que les denrées périssables que nos Agros ne produisent pas. Une cité-dirigeable survit en échangeant avec les autres cités. Elle tire ses ressources de la récolte de cails, de la chasse aux zeplins, ainsi que de sa production vivrière et manufacturière. Il n'y a pas de cités riches ou de cités pauvres. Elle ont des spécialités différentes en fonction de l'habileté de leurs maîtres de castes et en font commerce, se fournissant mutuellement ce qui leur fait défaut. Si la dégénérescence ou la décadence atteignent une cité-dirigeable et qu'elle n'est plus capable de fournir des biens à échanger, ou alors que ces habitants ne sont plus en mesure de la maintenir en état de marche, elle doit trouver d'autres moyens de survie. Certaines se tournent vers la piraterie... D'autres... ont un destin funeste dont personne ne souhaite parler..."

Une trémulation quasiment imperceptible fit vibrer le pont sous les pieds des convives.

"Nous accélérons...", murmurèrent Eron et Sven Corso quasiment au même instant.

"C'est tout à fait exact, messires", confirma le capitaine Ocano avec un regard appréciateur en direction des deux hommes. "Les Calfateurs ont terminé les opérations d'entretien de l'enveloppe, et les Navis ont mis en route tous les réacteurs pour regagner notre vitesse de croisière. Vous plairait-il de venir visiter le poste de commandement et la salle de navigation de Temuera après le repas ?"


[Moissonneurs des nuages]

Deux jours plus tard, Vraïm Ocano fit savoir à ses hôtes que les Sondeurs du poste de commandement avaient détecté une masse importante sur les écrans de télémétrie, à presqu'un millier de kilomètres de leur position. Un contact radio avait été établi : il s'agissait d'une communauté d'aérostats réunis à proximité d'une boucle de pression. Il fallut quatre heures supplémentaires de navigation pour que Temuera parvienne à distance d'observation visuelle.

Quinze corvelles, de petites cités-dirigeables de dix ponts en moyenne, longues de guère plus de deux cents mètres, étaient amarrées les unes aux autres et formaient un anneau de quatre klicks de diamètre, ce que les Ophiusiens appelaient une Ronde. De grandes voiles étaient déployées sur leurs flancs et tendues à l'horizontale entre des bômes, et ceux qui avaient accès à un dispositif de vision téléscopique purent observer des silhouettes humanoïdes se déplacer à grandes enjambées un peu comiques sur la surface de la toile, ramassant ce qui ressemblait à un gravier grossier.

Les traditionnels messages d'identification furent échangés par signaux lumineux, et Temuera fut autorisé à s'approcher.

Sémirande

[Deux jours]
Sémirande fit ses visites, elle aussi. Ce faisant, elle repensa à cette remarque d'Ocano : "...Les Calfateurs ont terminé les opérations d'entretien de l'enveloppe..." Curieusement, elle se demanda ce que deviendraient ces gens quand on commencerait à livrer des tissus NT6 pour entretenir les enveloppes.
Elle fit ses visites donc, mais se comporta plus en rat de bibliothèque, activité à laquelle on la voyait se livrer de plus en plus souvent. Partant du principe que les écrits de ces gens n'avaient peut-être pas tous été retranscrits dans les bases de l'Alliance, elle entreprit de les piller consciencieusement (et intellectuellement s'entend).
Y avait-il des archives oubliées ? Elle le chercha. Cachées ? Cela, c'était plutôt du domaine de Djal.
Les jours s’écoulaient, marqués par le ronronnement permanent des moteurs, par le bruit du vent, des grincements de la structure souple, par une ambiance sonore qui n’appartenait qu’à ce type d’habitat. Petit à petit, bercé par cette rumeur, Virik se détendait, commençant si ce n’est à apprécier ce voyage aérien, à s’habituer à cette vie entre les nuages.

Il était fasciné par la capacité d’adaptation de ces colons pour survivre à leur monde d’adoption. Adaptation technique certes, mais aussi sociale, culturelle. Plus d’argent, une nécessité vitale à pratiquer des échanges, à s’entraider. Il ne s’étonnait pas que l’Alliance se soit intéressée à ces survivants et à leur civilisation atypique. Il brulait de poser quelques questions complémentaires à leur hôte, notamment sur la structure sociale. Comment régulaient-ils les naissances ? Comment réglaient-ils les soucis de consanguinité ? Quels événements sociaux permettaient ils les rencontres entre les habitants des diverses cités ? Pouvait-on passer d’un habitat à l’autre facilement ? Mais il préféra observer et tenter de comprendre.

Il avait accompagné monsieur Djal dans sa visite technique, curieux d’avoir certains éclaircissements et sa vision sur certains choix techniques.

Alors qu’ils visitaient les entrailles du navire il demanda à monsieur Djal : N’avez-vous pas été un archéo-techno dans le temps ? Pensez-vous que tous ces dirigeables aient besoin d’unités antigrav ? A votre avis peuvent-ils s’en passer en cas de besoin ?



Plus tard alors qu’ils arrivaient à proximité de la « Ronde », il se rendit à la passerelle observant les ombres balayer le pont alors que le Temuera manœuvrait. Il adressa une salutation sous forme d’une inclinaison d’oreille à monsieur Eron, madame Sémirande, au commandant Gurvan, monsieur Djal si ceux-ci étaient présents.

A son habitude il s’adossa à une paroi, restant en retrait, veillant à ne pas rester dans les pattes du personnel navigant. Il scruta le ciel aux alentours recherchant d’autres dirigeables éventuellement suspects. Une forme de déformation professionnelle, bien inutile sans doute en raison de la présence de vigies, mais l’allusion au repas du capitaine quant à l’existence de pirates justifiait cette attention.
Durant les deux jours que dura le voyage, Eron prit part à toutes les propositions d'activités que le Commandant Ocano leur proposa. Eron était tout particulièrement impressionné quand il fallait faire des manœuvres à l'engin. On était loin des vaisseaux NT6 qui ne requéraient que quelques membres d'équipage assistés d'ordinateurs de bord surpuissants. Là il fallait des dizaines de personnes agissant de concert sur ordre du commandant. Tous déroulaient leurs partitions sans fausses notes résultats de nombreuses heures d'entraînement. Cette civilisation était loin d'être décadente, elle s'était réinventée pour s'adapter à son milieu.

Arrivé en vue de la ronde, il regarda comme tous le monde les petits bonshommes s'agiter sur les toiles tendues.

"Que font ils?"
Virik Kiikti Wrote:Alors qu’ils visitaient les entrailles du navire il demanda à monsieur Djal : N’avez-vous pas été un archéo-techno dans le temps ? Pensez-vous que tous ces dirigeables aient besoin d’unités antigrav ? A votre avis peuvent-ils s’en passer en cas de besoin ?

Il est rassurant de constater que des systèmes antigrav en état de marche équipent cette citée... Mais, c'est probablement une exception dût au statut très privilégié des Pourvoyeurs... La majorité des citées ne peuvent compter que sur leurs ballons et sur l'entretien d'une machinerie certes très solides mais qui demande fatalement des ajustements, voir des sacrifices ...

Djal demanda à Ocano : Malgré leurs spécialisations économiques et la fraternité qui unie les citées, certaines d'entre elles doivent être endettées, ou redevables de "vassalité" envers d'autres citées... Comment s'articule les liens, les alliances ? Comme cette Ronde...
[Recherches]

Dans la salle des cartes et les deux bibliothèques de la cité-dirigeable, il y avait des piles de blocs mémoriels à cristaux, inaltérables et donc parfaitement encore lisibles, mais inutilisables par la population locale en raison de l'absence de lecteurs appropriés, depuis longtemps tombés en panne et mis au rebut par faute de savoir-faire. Des générations d'archivistes consciencieux les avaient conservés, à côté des disques à ferrite, des microfilms puis des dossiers-papier qui leurs avaient été substitués au long des siècles de régression technologique. Sémirande trouva d'autres documents du même type chez les maîtres de caste de Temuera, retraçant les quinze siècles d'adaptation des ophiusiens à leur étrange foyer.


[Cueillette]

Ce fut Fazil Lemuel, le planétologue, qui répondit à Eron :

"La Ronde se trouvait à proximité d'une boucle de pression, une zone de vents tourbillonnants relativement stable. Lorsqu'elle s'est résorbée, il s'est produit une pluie de pierre..."

"Ils appellent ça le tazcail", précisa Norj Pal'Kis, l'ethnologue azzari.

"Les cails sont des concrétions rocheuses", continua Monsieur Lemuel, "produites par agglutination de particules de poussière en provenance de l'anneau planétaire ou de la désintégration incomplète de météorites, au coeur de la boucle de pression. Elles ressemblent à un gravier de pierre ponce assez grossier, dont elles ont la faible densité. Les cails retombent en grêle -- le tazcail -- lorsque le vortex se dissipe, et sont récupérés à l'aide des voiles que vous voyez tendues sur les flancs de ces corvelles."

"Ils s'en servent principalement comme lest", reprit Norj Pal'Kis. "Mais une autre utilisation est la production d'huile de cail. De l'huile obtenue par pressage des nodules graisseux du gralichen, est filtrée dans un cail poreux, ce qui lui donne des vertus curatives. Une coutume semi-religieuse, dite du Partage de l'huile, veut que deux cités-dirigeables, lorsqu'elles commercent, échangent de l'huile de cail."

Le capitaine Ocano n'était hélàs pas disponible pour assouvir la curioisté de l'équipe, affairé à organiser la rencontre avec les corvelles de la Ronde. Le jeune Daïnil, cependant, était avec eux et répondit à la question de Djal :

"Il n'y a pas de dettes, parce qu'on ne fait pas crédit. Si on n'a pas de quoi commercer, on ne commerce pas. Pour les alliances, elles ne durent jamais très longtemps. Par exemple, quand plusieurs frègues chassent le zeplin ensemble, les capitaines se mettent d'accord avant sur le partage de la proie. Les attaquants ont droit à la meilleure part, naturellement. Les ballons qui font partie de l'assaut de renfort ont une part moindre, et les autres se contentent du dépeçage final. Ensuite les frègues se séparent. Les Rondes de corvelles, comme celle-ci, partagent leurs ressources pour le bien de la communauté. Elles peuvent ainsi récupérer plus de cails ensemble que ne le pourrait chacune d'elle individuellement."


[Commerce]

Pendant l'heure qui suivit, ils purent observer par les baies vitrées l'activité fébrile autour de l'aérostat des Pourvoyeurs. Temuera manoeuvra pour s'approcher à quelques dizaines de mètres de la plus grosse corvelle de la Ronde, que Daïnil leur désigna sous le nom d'Avestama. Puis les échanges commerciaux commençèrent : les plate-formes à frêt, suspendues sous des chapelets de ballons s'étendant verticalement sur une centaine de mètres, accomplissaient des allers et retours le long de câbles reliant les soutes des deux géants des airs, transbordant les marchandises sur lesquelles les capitaines s'étaient mis d'accord par radio.

Le visage de Daïnil se figea soudainement tandis qu'il plissait les yeux pour distinguer quelque chose à l'horizon, et ses traits prirent une expression alarmée comme il tendait le doigt vers un grouillement de petits points noirs s'approchant à grande vitesse. Avant qu'il n'ait pu dire un mot, de brefs coups de trifflets retentirent dans les hauts-parleurs de la cité, puis le signal tonitruant d'une corne d'alerte avertit tous les occupants du dirigeable qu'un danger approchait.

Daïnil quitta la salle d'observation au pas de course en lançant d'une voix où se mêlaient la crainte et l'excitation :

"Des planêles ! Elles seront là dans moins d'une minute !"

[hrp]Que faites-vous ?[/hrp]

Sémirande

[Indécision]
"J'y vais, j'y vais pas ?" Dit Sémirande à mi-voix. Elle haussa les épaules. Elle ne savait pas comment lutter contre ces trucs. Que pourrait-elle donc faire, si elle se rendait sur le... pont ? Au mieux, réussir à ne pas se mettre dans les jambes des combattants. Au pire les gêner.
Elle resta donc là pour l'instant.
Virik était toujours sur la passerelle, dans son coin.

Il plissa les yeux. Des planêles ? Planêles sauvages ou d’élevage ? Un troupeau guidé vers la ronde ?

Il lui semblait avoir lu que les rondes pouvaient aussi servir à ça et qu’il y avait plusieurs espèces de planêles.

Alors qu’il observait les points noirs en rapprochement se découpant sur le firmament lumineux il regretta ne pas avoir emporté si ce n’est son armure énergétique, au moins un antique instrument optique qui lui aurait permis d’avoir plus de détails …

Etait-il possible que ce troupeau soit « poussé » par des pirates, des navires légers qui se serviraient de ces animaux pour masquer leur approche ? Que ceux-ci s’en serve comme diversion pour attaquer par ailleurs ? Il ignorait les tactiques qu’employaient les flibustiers des airs. Et il était trop tard pour se renseigner.

Pour l’heure sa seule responsabilité était de veiller à la sécurité de l’équipage du Lilith et de ses passagers. Il se saisit discrètement de son communico et lança un appel bref « Equipage et passagers du Lilith, de Virik, signalez votre position actuelle et vos déplacements. Accusez réception ».

Et attendant les réponses il saisit dans sa bourse une feuille qu’il coinça entre ses lèvres, sans pour autant l’avaler pour l’instant.
Eron se demanda ce qu'il allait se passer. est ce que les planèles représentait une menace absolue et il fallait se mettre à l'abris. Ou si malgré le danger l’opportunité d'une chasse ne pouvait se louper.

Dans un cas comme dans l'autre le mieux était d'être avec les "locaux". il emboîta donc le pas à Daïnil.
Djal ne savait quoi faire... Il assura sa prise sur la sangle qui retenait sixuit et chercha mentalement le trajet qui menait à la capitainerie... puis d'instinct il se mit à suivre Daïnil et Eron.
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